Rencontre animée par Matthieu Péchenet, docteur et enseignant à l’Université de Lille. Il travaille notamment sur les relations entre film, histoire et témoignage.
« Pense à l’Amérique, me suis-je dit.
Aux cités, aux maisons, à tous les gens, aux arrivées, aux départs, à la venue des enfants, à leur départ, à la mort, à la vie, au mouvement, à la parole.
Pense au profond soupir intérieur de tout ce qui vit en Amérique.
Penche-toi. Ramasse ce que les autres laissent perdre de la vie.
Et fais-en quelque chose. »
Arnaud des Pallières
En 1952, Guy Debord ironisait : « le monde entier a déjà été filmé, passons tout de suite au débat ». Oui, le monde a déjà été filmé. Surtout les États-Unis qui ont largement inondé la planète de leurs images. Passons donc à leur montage ! Tout dans cet océan d’images est pour moi occasion d’intuition, d’approximation, d’imagination. La mienne mais surtout celle du spectateur (…). J’ai une confiance absolue dans sa faculté de créer lui-même le film qu’il est en train de regarder. Pour cela, images et récits doivent entretenir un rapport libre, flottant, presque indécidable, selon une poétique de l’intuition et de la sensation. Comme moi, le spectateur doit pouvoir se projeter dans d’autres temps, dans d’autres présents que le sien. (…) Il doit pouvoir accéder à d’autres vies que la sienne.
Propos d’Arnaud des Pallières à propos de son film Journal d’Amérique.
Né en 1961 à Paris, Arnaud des Pallières fait des études de cinéma à la Fémis, où il développe ses premiers films, oscillant entre fiction et documentaire. Dès ses débuts, il réalise pour la télévision plusieurs films essais dont Is Dead (CM-1999), un portrait de Gertrude Stein pour Un siècle d’écrivains et le film Disneyland, mon vieux pays natal (CM-2001). Pour le cinéma, il signe cinq longs métrages : Drancy Avenir (1996), Adieu (2003), Parc (2008), Orpheline (2016) et Michael Kohlhaas (2013), sélectionné en compétition au Festival de Cannes 2013, avec Mads Mikkelsen dans le rôle-titre. Sortira début 2024, son nouveau film, Captives. En parallèle de ces productions pour le cinéma, Arnaud des Pallières développe un projet de fresque visuelle et sonore brossant des histoires américaines du XXe siècle, réinventées à partir d’archives provenant du fonds américain Prelinger. Diane Wellington (CM-2010), Poussières d’Amérique (2011) et aujourd’hui Journal d’Amérique (2022), sont issus de ce processus.
Les films amateurs, les archives familiales, les images anonymes du XXe siècle constituent une mémoire visuelle et audiovisuelle, collectée et mise en valeur depuis une vingtaine d’années par de nombreuses archives, dans un contexte numérique qui en favorise la diffusion et le réemploi exponentiels, alors même que de nouvelles images amateures continuent d’être produites et partagées en ligne. Plusieurs artistes, notamment des cinéastes, s’emparent de ces images d’hier ou d’aujourd’hui, pour créer une œuvre seconde, nouvelle et contemporaine, aux enjeux divers, mémoriels, critiques, esthétiques ou politiques, avec une charge émotionnelle singulière liée à ce matériau premier. Ce sont ces pratiques de réemploi que le programme de recherche REC.forward entend interroger lors d’un colloque réunissant des chercheurs et des archivistes du monde entier (colloque des 24 et 26 octobre). Projections, workshop et ciné-concert sont proposés à tous, dans différents lieux culturels niçois et monégasques (semaine du 23 octobre). www.rec-forward.fr
Fondées à New York en 1983 par Rick Prelinger, ces archives sont devenues en une vingtaine d’années, une collection de plus de 60 000 films (home-movies, films publicitaires, éducatifs, industriels). En 2002, cette première collection a été acquise par la Bibliothèque du Congrès. Depuis, les Archives Prelinger continuent de collecter, de préserver et de faciliter l’accès aux films d’importance historique qui n’ont pas été sauvegardés ailleurs (11 000 titres au format numérique ou en cassette vidéo – provenant de film pellicule). www.archive.org/details/prelinger
Droit d’entrée : 5€